En France, la démocratie est représentative...
Nos différentes Constitutions et Institutions ont édifié lentement ce partage des tâches et des responsabilités : le citoyen est représenté par un élu, qui prête sa voix à qui lui a donné la sienne. Système où le trépied de l’efficacité, de l’équité et de la responsabilité de l’action repose sur l’élu, tant il est vrai que soixante millions de citoyens ne peuvent prendre une décision uniment, sauf si on la réduit à l’alternative du « oui » ou du « non ».
La démocratie représentative s’est donc imposée à cause de la volonté républicaine de faire accéder à la décision un plus grand nombre d’acteurs que ne le permettait le suffrage censitaire, un état de droit qui nous semble aujourd’hui bien inaliénable, alors que tant de pays ne l’ont pas encore atteint. Mais l’Histoire ne galope pas partout au même train, et en Europe, des indicateurs nous montrent que nous devons dépasser le seul mode représentatif. Qu’entend-on aujourd’hui de la place du citoyen dans la vie politique ? « Perte de confiance » « montée des abstentions » « désengagement des plus jeunes » disent fréquemment l’imperfection de notre système de représentation. On relaye moins souvent le discours, pourtant réel, de certains élus, sur la difficulté à assumer un rôle controversé par d’irréductibles mécontents, et ce, quoi qu’on leur propose.
Perte de confiance d’un côté, isolement inquiet de l’autre sont pourtant les deux faces d’une même évolution : personne ne peut construire seul une réponse à la complexité des interactions de notre organisation désormais mondialisée, ni à l’émergence d’une telle société de l’information. C’est l’élargissement au plus grand nombre qui a généré la démocratie représentative, et la même cause appelle aujourd’hui une autre transformation : c’est le plus grand nombre d’acteurs informés qui induit une participation du citoyen en amont des décisions politiques. Il nous faut donc faire ensemble autrement ... Et pour cela, nous avons besoin d’un maillage différent entre le Politique et le Citoyen. S’il est probable qu’une décision devra finalement toujours être prise par un ou peu d’acteurs, il apparaît que cette décision devra être alimentée, préparée, par l’information que représente le plus grand nombre.
Les sociétés que nous avons engendrées demandent à construire un mode politique plus partagé, ce que l’on appelle parfois « la concertation » et plus souvent encore « démocratie participative » (non, ce n’est pas Ségolène Royal qui l’a inventé, mais ce n’est pas par hasard qu’elle l’a utilisé... !) C’est au Politique et au Citoyen de construire ensemble une autre alliance entre démocratie représentative et démocratie participative. Personne ne sait bien le faire. Car plus que des outils ou des méthodes, cette co-construction demande de changer nos représentations personnelles, notre carte d’un monde qui a changé d’échelle.
Aujourd’hui c’est seulement ensemble que l’on peut être efficace, équitable et responsable. Le citoyen retrouvera confiance en son élu quand il aura participé à construire le sens de la représentation dont il le charge, au lieu d’assister impuissant à une représentation théâtrale dont il n’a pas écrit le texte.
Evelyne Biausser