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MODEM LE CANNET ROCHEVILLE
14 août 2008

Journal de l'été-8-

Un centralisme im-pertinent

 

Héritage omniprésent dans l’inconscient collectif français, le centralisme des pouvoirs continue donc d’influencer l’organisation politique et institutionnelle de notre pays.

J’ai récemment trouvé dans une analyse de Pierre Calame[1] une réflexion très proche des convictions et observations que j’ai pu retirer de ma courte vie d’élue et de ma longue vie professionnelle !

Pour l’ancien Haut Fonctionnaire, ayant constaté depuis longtemps « qu’aucun problème n’est plus ou local ou global »,  il s’agit moins aujourd’hui de penser le gouvernement que la gouvernance de l’action publique, alors que précisément, l’articulation des niveaux de gouvernance est une question refoulée en France.

Tout d’abord à cause de l’obsession féodale qui nous anime toujours, exprimée  à travers la question : « qui décide ? »

Ensuite parce que nous fonctionnons en termes de compétences légales, ce qui est devenu un découpage opérationnel im-pertinent à l’échelle de la gouvernance. Le découpage des pouvoirs en cases ou silos verticaux, non seulement émiette aujourd’hui la productivité, mais  bloque également toute velléité de  fonctionnement transversal.

De ce fait, sur chaque sujet il existe un Responsable et un seul, ce qui a eu pour conséquence de  nous  amener  à « cette théorie aberrante » des blocs de compétence.

Ce découpage en cases de la réalité sociétale que l’héritage français nous fait voir comme un « garant de la démocratie » aboutit pourtant à l’inverse : tout le monde s’occupe de tout dans un chaos croissant...qui risque de perdurer tant que l’articulation des pouvoirs ne sera pas pensée dans une échelle plus large de gouvernance.

L’on s’est donc arrangé pour qu’aucune collectivité n’ait de tutelle sur les autres, par peur des conflits politiques. Il ne reste que le niveau étatique pour arbitrer ou décider –encore l’héritage du centralisme- et c’est un arbitre im-pertinent, car trop grand ou trop petit, pour l’échelle où il est obligé d’intervenir.

Pierre Calame attribue aussi à notre « conception patrimoniale du pouvoir »  une dérive qui handicape fortement sa modernisation[2] : c’est « un jeu à somme nulle, un gâteau à partager » qui n’en fait pas un espace de coordination ou de projet.

 

La solution qui permettrait d’articuler les différents niveaux de gouvernance nous rendant pertinents à cette échelle désormais nécessaire à la gestion de la chose publique, serait ce que l’auteur appelle « la subsidiarité  active ».

Celle-ci repose sur une modification d’importance du faire politique, et encore plus du « pensé » politique.

Il faudrait déjà comprendre que ce n’est pas en cherchant des solutions que l’on apprendra la gouvernance, mais en listant les questions communes (qui sont les mêmes partout) à partir des expériences de chacun. Ce qui revient à inverser le mode de fonctionnement habituel en politique : au lieu de l’infiniment particulier, partir de ce qui nous est commun. Au lieu de recettes et de moyens fixés à l’avance, faire émerger des principes d’action et des obligations de résultats communs.

 

En somme relier là où l’on émiette et  partir de l’amont plutôt que de l’aval.

L’Union Européenne a déjà commencé ce faire différent avec la « coordination ouverte », même si cela reste encore une expérience non théorisée.

 

La gouvernance demande donc d’apprendre ensemble à faire autrement sur nos territoires, et de faire autrement pour apprendre ensemble à produire une réponse plus pertinente, au défi que rencontrent  toutes les échelles  politiques : concilier la production « d’un maximum d’unité et d’un maximum de diversité ».

 

 

 

 

Evelyne Biausser


[1] Contribution à la charte de la gouvernance locale élaborée par le Ministère français des affaires étrangères ; intervention au séminaire du 28 mars 2008- Pierre Calame est Polytechnicien, ancien Haut Fonctionnaire et Directeur de la Fondation C-L Meyer pour le Progrès de l’Homme

[2] Et j’ajouterai l’intérêt et la confiance de la population...

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Commentaires
E
Bravo pour ton article tout à fait intéressant sur la comparaison entre l'algorithme des fourmis<br /> et l'organisation de notre parti.<br /> Oui c'est difficle pour tout un chacun de persister dans ce fonctionnement innovant...et déroutant. Pourtant, sortir de la pyramide est la condition première pour qu'on ne fasse pas comme les autres, seulement comme les autres!<br /> C'est bien d'une autre organisation sociétale qu'il est question, et c'est pourquoi c'est si difficile, à faire, à faire comprendre, à faire vivre!<br /> Reste que devons développer nos phéromones...de façon un peu plus complexe que les fourmis. <br /> L'Université de rentrée les 5,6,7 septembre devrait nous y aider!
C
L'organisation en réseau défendu par Thierry Crouzet dont je me suis inspiré dans mon billet "Algorithme de colonies de fourmis appliqué au mouvement démocrate" (http://www.cedric-augustin.eu/index.php?2007/05/15/231) est un autre angle d'approche pour résoudre le cloisonnement introduit par le système pyramidal.<br /> <br /> On y parle comme ici de liens transversaux au lieu de pyramidaux.<br /> <br /> Je pense que le problème de la réforme de nos modes de gouvernance et d'organisation, tient au fait que l'organisation pyramidale est la plus simple à mettre en oeuvre et à gérer. <br /> <br /> Introduire des liens transversaux (gouvernance par objectif communs) ou carrément un mode de fonctionnement nodulaire (organisation en réseau) nécessite une forte volonté et des compétences à chaque extrémité d'un lien. Or ce sont les compétences qui font défaut. La culture qui prévaut dans bon nombre d'organisations néglige les connecteurs qui ne sont pas jugés productifs, donc secondaires.<br /> <br /> Sans connecteur, pas de liens. <br /> <br /> L'approche comptable de la gestion des ressources et des compétence est une des plus grande barrière à la réforme des organisations. Or à quoi sont réduits nos élus, si ce n'est à mener une politique comptable au lieu d'une politique de projet.
MODEM LE CANNET ROCHEVILLE
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